Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
4 mars 2014 2 04 /03 /mars /2014 08:39
Wajma, une fiancée afghane

D'emblée, la surprise de se retrouver en plein Kaboul, comme si la capitale afghane était une ville comme les autres, avec ses échoppes, ses embouteillages, ses taxis, ses habitants. Surprise plus grande encore de découvrir Wajma et Mustafa, deux jeunes amoureux comme il en existe dans la plupart des grandes villes du monde. Lui, d'origine iranienne, habillé à l'occidentale, avec de petites lunettes qui lui donnent un vague air d'étudiant (en réalité, il est serveur dans un restaurant). Elle, charmante et timide, étudiante en droit, vivant encore chez ses parents. La mère est en adoration devant sa fille ; le père, loin de Kaboul, travaille à déminer des zones de guerre.

Wajma Bahar dans le film afghan de Barmak Akram, "Wajma, une fiancée afghane".
« Wajma, une fiancée afghane » : le combat d'une Afghane pour le simple droit à aimer

Le Monde.fr a le plaisir de vous offrir la lecture de cet article habituellement réservé aux abonnés du Monde.fr. Profitez de tous les articles réservés du Monde.fr en vous abonnant à partir de 1€ / mois | Découvrez l'édition abonnés

 

Lire :  la rencontre avec trois acteurs du film

Une guerre qui est loin des préoccupations des personnages de ce film poignant et courageux réalisé par Barmak Akram. Diplômé de la Fémis, des Beaux-Arts et des Arts déco, il est l'auteur de textes de chansons interprétées par M (Mathieu Chedid) ou encore Susheela Raman, de nombreux films documentaires et d'un premier long-métrage, L'Enfant de Kaboul (2009), écrit en collaboration avec Jean-Claude Carrière.

Wajma et Mustafa s'aiment et rien ne semble pouvoir entraver leur passion naissante. Naviguant savamment entre tradition et modernité, ils semblent résignés à attendre le mariage pour pouvoir faire l'amour. Sauf qu'un soir, Mustafa est pris d'un violent désir…

A cet instant, ce qui aurait pu être un conte moral afghan bascule dans le tragique. Apprenant que sa fille est enceinte, le père de Wajma revient à la maison. On découvre en Mustafa un homme d'une insigne lâcheté. L'archaïsme des traditions refait violemment surface. On comprend alors que le propos d'Akram n'est pas tant de raconter une histoire d'amour que de décrire les traitements discriminatoires dont sont victimes les femmes en Afghanistan.

Wajma Bahar et Mustafa Abdulsatar dans le film afghan de Barmak Akram, "Wajma, une fiancée afghane".

Dans ce pays ambivalent, dont on sent à quel point il aspire à la modernité, environ 500 femmes s'immolent chaque année, seul moyen souvent pour elles d'échapper aux pesanteurs et à la violence d'une société incapable de leur reconnaître le droit d'aimer quand elles le souhaitent.

Il neige sur Kaboul. Au loin, de magnifiques montagnes encerclent la ville, donnant l'impression de vouloir l'enfermer, lui imposer des traditions que les téléphones portables et les ordinateurs ne tarderont pas, peut-être, à faire voler en éclats. Honneur familial sali, vie maudite à jamais, empreinte des archaïsmes les plus fondamentaux, la colère du père de Wajma semble sans limites. Et pourtant, à voir la résistance sourde qui commence à se mettre en place dans la maison, on se prend à espérer qu'un jour Wajma réussisse à sortir de cet enfer. Lorsque le père de celle-ci se risque à solliciter une consultation juridique au procureur de Kaboul, le diagnostic tombe : « L'esprit arriéré de notre société peut provoquer la mort sociale de votre fille. Emmenez-la loin d'ici. »

Les acteurs sont remarquables, à commencer par Bahar Wajma (Wajma) et Haji Gul Aser (son père). Prix du scénario au Festival du film de Sundance 2013, Wajma, une fiancée afghane est un film d'une grande force, confirmant le talent de Barmak Akram, à la fois scénariste, chef opérateur et réalisateur de ce long-métrage.



Film afghan de Barmak Akram avec Bahar Wajma, Mustafa Abdulsatar, Haji Gul Aser, Breshna Bahar (86 minutes).

Sur le Web : www.ascdistribution.com/fiche.asp?id=59

 

"Wajma, une fiancée afghane", de Barmak Akram

 

Partager cet article
Repost0

commentaires