LE QUATUOR
Film de Yaron Zilberman avec Christopher Walken, Philip Seymour Hoffman, Imogen Poots...(1h47)
Lorsque le violoncelliste d’un quatuor à cordes de renommée mondiale apprend qu’il est atteint de la maladie de Parkinson, l’avenir du groupe ne tient plus qu’à un fil. Entre les émotions refoulées, les égos et les passions incontrôlables qui se déchaînent alors, la longue amitié qui unit les quatre virtuoses menace de voler en éclats.À la veille du concert qui célèbrera leur 25e et sans doute ultime anniversaire, seuls leurs liens étroits et le pouvoir de la musique peuvent encore préserver ce qu’ils ont construit.
Le quatuor : Beethoven par amour
Existe-t-il une seule chose conséquente sur Terre qui ne soit Art ? Sous toutes ses formes, visuelles, intellectuelles, auditives, sensibles, la création des êtres insuffle autant de sens qu'il se peut à des existences qui en semblaient pourtant dénuées. Une des manifestations sublimes de ce talent mortel est la musique. Ensorceleuse, elle insuffle autant de passion aux âmes échaudées qu'elle entraîne ses auteurs sur la voie de la perdition. Le Quatuor se fait le témoin conquis de cette valse diabolique et redonne, non sans peine, ses lettres de noblesse à la musique classique.
Depuis plus de vingt-cinq ans, le quatuor à cordes La Fugue, formé de virtuoses issus de la Julliard School, envoûte un public de connaisseurs venu des quatre coins du monde. L'interprétation de l'Opus 131 de Beethoven, qu'ils dévoilent aux oreilles attentives, retranscrit la structure architecturale de la beauté même. Cette alchimie parfaite est mise en pièces par le diagnostic cruel fait au mentor et membre fondateur du groupe. Atteint de la maladie de Parkinson, Peter se voit dans l'obligation de prendre sa retraite et réduit en cendres d'un même élan le substrat de leurs réalisations. Les névroses les plus viles des inconscients de chacun des membres font alors leur apparition. Les égos des uns se heurtent aux aspirations des autres et l'harmonie des instruments se voit rapidement balayée par une cacophonie de caractères.
Chaque instant de grâce du film est dû à son casting fabuleux. La descente aux enfers de Christopher Walken émeut aux larmes, la difficile prise de conscience de Philip Seymour Hoffman dérange tout autant, et le spectateur ne peut se défaire de l'emprise totale exercée par Mark Ivanir. Imogen Poots, ravissante, convainc, à l'image de ses aînés, avec sa languide performance de fille mal-aimée. Les spectateurs rompus à la maîtrise de l'archet décèleront la mystification. Mais la virtuosité de l'expression de leurs talents de comédiens est sans égale.
Le Quatuor n'est cependant pas exempt d'arrogance. Le film se complaît dans une démonstration par trop élitiste pour être acceptable. La musique classique, à l'attrait incontestable, se sait capable d'ébranler un public hétéroclite. Ainsi le seul étalage de moyens dévoués à une bourgeoisie mesquine dérange. L'on sait néanmoins gré au long-métrage de rendre honneur à une des merveilles de ce monde et l'on se laisse bercer par le savoir-faire combiné des comédiens et des compositions hors du temps.
Une ode aux amoureux fiévreux de mélodies intemporelles.
Par Emma Martin